Le volcanisme : un phénomène tout à fait naturel, mais dangereux
Le volcan Nyiragongo, à l’Est de la République Démocratique du Congo (RDC) sème la terreur. L’éruption du 22 mai 2021 a fait des dizaines de victimes et des infrastructures socioéconomiques ont été touchées par la coulée des laves. Les images de ce phénomène deviennent virales sur les réseaux sociaux. Certains croient à des mystères alors que d’autres parlent des surprises de la nature parmi tant d’autres. Pas du tout ! Il s’agit d’un phénomène tout à fait naturel et le Burundi n’est pas épargné
La rédaction s’est entretenue avec Théodose Simuzeye, enseignant-chercheur à l’université du Burundi dans la faculté des Sciences, département des sciences de la terre pour y voir plus clair. Il commence par définir ce que c’est un volcan. Il s’agit d’une action des magmas provenant des profondeurs dans une chambre magmatique qui arrivent à la surface de la terre en passant par les fissures-les failles assez profondes. Ainsi, on distingue deux types de volcans, à savoir : le magma basique et le magma acide. Pour le cas du magma basique, le volcan est effusif, c’est-à-dire qu’il y a des laves qui coulent tandis que pour le magma acide, la lave est moins visqueuse et on assiste à un volcan explosif. Le volcan de Nyirangogo en éruption actuellement crache des laves basiques. Donc, c’est un volcan effusif.
Pourquoi des volcans ?
Dans la structure de la terre, en dessous de nos pieds, il y a des magmas. Donc, quand il y a une zone de faiblesse, en l’occurrence une fissure assez profonde le magma en profite pour remonter vers la surface. Pour Nyiragongo, c’est tout à fait normal, car il se trouve dans la zone du rift (qui part de l’Ethiopie et qui descend vers le Sud de l’Afrique) qui présente de nombreuses failles. Pour le cas du Burundi, on a des eaux thermales qui sont en réalité des eaux qui s’infiltrent et qui remontent après être entrées en contact avec le magma (si le magma est trop proche l’eau sera trop chaude). Ce qui prouve que nous sommes dans une zone très active où on peut avoir un volcan facilement, prévient le spécialiste. Il fait savoir que la zone de faille correspond effectivement à la zone où on se trouvent le lac Tanganyika, le lac Kivu, le lac Albert et le lac Nyassa au Sud. « Toute cette zone là jusqu’en Ethiopie constitue une zone très active ».
Quid des mesures de prévention ?
Il est impossible d’empêcher un volcan d’entrer en éruption, car nul ne peut fermer une fissure dans la croute terrestre. D’ailleurs, les forces sont colossales de manière à telle enseigne que si une explosion ait lieu, les cendres montent jusqu’à 11 km d’altitude. C’est tellement difficile pour les humains d’arrêter une explosion d’une telle force, s’exclame Simuzeye.
Tout ce qu’on peut faire c’est au niveau de la prévention. Il existe des systèmes pour suivre l’activité des volcans. Si on constate quelque chose d’anormale, on évacue les populations environnantes. Au niveau de la sous-région, il y a un laboratoire volcanologique à Goma qui suit régulièrement le volcan Nyiragongo. D’ailleurs, il y avait fait une expédition l’année dernière, car le volcan est toujours en activité : la lave jaillit toujours du cratère. Cette fois-ci, on a eu assez de lave pour que ça déborde. On a enregistré un tremblement qui a eu lieu avec la première éruption et ses répliques ont été enregistrées ces derniers jours. Raison pour laquelle, on conseille aux habitants d’évacuer vers les localités de Sake ou de Rubavu au Rwanda parce que l’activité volcanique est toujours là.
Le Burundi n’est pas à l’abri
Le chercheur révèle que le Burundi pourrait connaître un volcan un jour. L’année dernière, le pays a été secoué par un tremblement de terre et une source d’eaux thermales a disparu dans la partie rwandaise de la zone du rift. Actuellement, les médias locaux rapportent une diminution progressive des eaux thermales de la localité de Nyamyumba dans le district de Rubavu suite à la récente éruption du volcan Nyiragongo. Par contre, chez nous au lieu de se fermer, il y a une certaine ouverture. On rapporte que dans la commune de Rugombo, on a enregistré de nouvelles sources des eaux thermales. Ce qui montre qu’il s’agit d’une zone en activité parce que, selon les prévisions, cette zone-ci a tendance à se séparer du reste de l’Afrique. Les géologues savent très bien qu’il s’agit d’une zone en ouverture. Du moins, si on adhère à la théorie de la tectonique des plaques. Et à un certain moment, on aura le Burundi qui sera carrément séparé de la République Démocratique du Congo (RDC).
Le Rwanda a déjà connu des volcans dont le volcan Nyamuragira. Nous sommes dans une zone volcanique. Si le volcan Nyiragongo venait à changer de forme, les cendres volcaniques pourraient atteindre le Burundi. Dans le passé, les laves ont coulé jusqu’à Rugombo puisqu’on trouve des roches volcaniques.
Il faudra engager plus de moyens dans la prévention de ce genre de phénomène. Le Burundi dispose d’une station sismique qui enregistre le moindre tremblement de la terre. On effectue des relevés à chaque tremblement de terre pour identifier sa source. « Ne vous en faites pas nous disposons d’une station qui suit régulièrement ces phénomènes-là », rassure notre interlocuteur.
Le Nyiragongo est un stratovolcan de la vallée du Grand Rift situé en République Démocratique du Congo. Il est localisé dans les montagnes des Virunga à une vingtaine de kilomètres au Nord de la ville de Goma et du lac Kivu et à l’Ouest de la frontière du Rwanda. Par sa proximité avec des zones densément peuplées, ses éruptions fréquentes dont la dernière a débuté le 17 mai 2002-avec une nouvelle phase éruptive le 22 mai 2021-et la présence d’un lac de lave quasiment permanent (une rareté dans le monde) pouvant se déverser sur ses pentes en de longues coulées de lave considérées comme les plus rapides au monde, le Nyiragongo est un des volcans les plus actifs et dangereux d’Afrique.